Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
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LE SOLDAT ROMAIN QUI FUIT EST PUNI PAR LE BATON

L’homme politique et historien romain SALLUSTE (v. 86 – 35 av. J.-C.) est l’auteur d’une « Histoire de la République romaine » dont nous extrayons ce qui suit, d’après une édition de 1777. Il raconte un épisode de la guerre contre Spartacus et les esclaves révoltés (73 av. J.C.), conduite par Crassus (115 – 53 av. J.C.).

Celui-ci envoie son premier lieutenant Mummius au devant de l’armée de Spartacus, avec ordre de ne pas engager le combat avant que Crassus l’ait rejoint. Mummius désobéit, croit qu’il va être victorieux mais son armée est mise en déroute. Les soldats s’enfuient devant l’ennemi. Mummius est alors sévèrement réprimandé et les soldats sont punis suivant le système de la décimation, c’est-à-dire qu’un soldat sur dix est condamné au bâton.

« Quant aux troupes, le Préteur, irrité à l’excès de cette dernière lâcheté, à la suite de tant d’autres, résolut d’en faire un si rude châtiment qu’il n’arrivât plus rien de pareil à l’avenir. A cet effet, il remit en vigueur une ancienne loi militaire inusitée depuis plusieurs siècles, mais autrefois mise en usage à l’armée, lorsqu’on voulait augmenter la honte des coupables par le genre de supplice, surtout dans le cas où un corps avait abandonné son chef.
Il mande à la tête du camp des cohortes qui, au dernier combat, avaient fui les premières et jeté leurs armes, et les ayant décimées, les fait dépouiller de l’habit de soldat et assommer à coups de bâton tous ceux sur qui le sort était tombé (1).
Ce genre de peine couvre le soldat d’une telle ignominie, que ceux qui en réchappent (ce qui arrive quelquefois) n’en sont guère mieux. Ils ne peuvent jamais reparaître : qui que ce soit, pas même leur plus proche parent, n’oserait leur donner asile en sa maison : on regarde comme mort celui qui a une fois subi ce supplice infâme. »

En note (1) le traducteur a donné des informations sur cette bastonnade punitive. « Le supplice à coups de bâton était l’ancienne peine du soldat qui avait quitté son étendard ou son poste de sentinelle, abandonné son général, ou commis quelque crime extraordinaire. On mettait une différence entre le Romain et l’auxiliaire, en battant le premier à coups de sarment et l’autre à coups de bâton. « Voilà, dit Polybe, la manière d’y procéder. On assemble le conseil de guerre, où le Tribun préside. Si l’accusé est condamné, le Tribun prend une canne, dont il frappe légèrement le coupable : à l’instant les soldats légionnaires l’assomment à coups de bâton. L’exécution se fait pour l’ordinaire dans l’intérieur du camp. (…) On y condamne ceux qui ont commis des vols dans le camp ; qui ont porté un faux témoignage, en accusant un autre soldat de quelque faute grave par devant son officier ; qui ont abusé de leur jeunesse par un commerce infâme avec leur camarade ; qui ont déjà été puni trois fois de quelqu’autre manière, pour le même genre de faute ; qui, par lâcheté, ont quitté leur poste, ou jeté leurs armes, et pris la fuite pendant le combat.

Si c’est un corps qui a commis la faute, on ne fait pas mourir tous les soldats ; mais on les met sans distinction dans le cas de subir la peine, d’une manière très propre à les contenir tous. Le Tribun fait amener les coupables à la tête de la légion et après la plus sanglante réprimande, il les fait tirer au sort, au nombre de cinq, de dix, de vingt, plus ou moins, selon la faute et selon le nombre, c’est-à-dire que sur dix coupables, il y a toujours un billet noir. Le malheureux sur lequel il tombe est exécuté sans rémission, comme je viens de dire. »

Ceci se passait il y a 2000 ans… mais s’est cruellement répété en 1917, durant la Grande Guerre, pour punir les bataillons qui s’étaient révoltés ou avaient paru manquer de courage devant l’ennemi… Seul le bâton a été remplacé par le fusil.

Sur l’emploi du bâton comme punition voir l’article : Un châtiment universel : les atrocités de la bastonnade et tous les articles de la rubrique « Punitions par cannes et bâtons ».

L’illustration provient du livre « La première année de latin » par Cart, Grimal, Lamaison et Noiville (1957), dont se souviendront les lecteurs les plus âgés de cet article qui l’ont eu entre les mains au collège, en 6e !

Article rédigé par Laurent Bastard, merci :)

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