Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
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« DUEL A COUPS DE GOURDIN », PAR GOYA (VERS 1820)

En 1818, le grand peintre espagnol Francisco GOYA (1746-1828) acquit la « Maison du Sourd » aux environs de Madrid. Il peignit sur les murs plusieurs compositions qualifiées par les spécialistes de « peintures noires », à cause de l’étrangeté des scènes.

Parmi elles figure le « Duelo a garrotazos » (Duel à coups de gourdin), oeuvre qui fut transférée sur toile vers 1875. La peinture, qui mesure 123 cm sur 266 cm, est aujourd’hui exposée au Prado.

Elle nous montre deux hommes s’affrontant violemment avec des gourdins, à gauche, dans un vaste paysage désert. Curieusement, les personnages sont enlisés dans le sol jusqu’à mi-jambes, mais on sait aujourd’hui, grâce à une photo de 1874, que sur l’oeuvre murale, ils étaient dans de hautes herbes. Le transfert et les importantes retouches les ont fait disparaître, accentuant du même coup l’impression d’un drame inéluctable.

Ce tableau animé et violent ne laisse pas indifférent. Il a très tôt fait l’objet d’interprétations diverses. Goya lui-même l’avait appelé « Dos Forasteros », c’est-à-dire « Deux étrangers ». Les uns y ont vu une image des luttes fratricides qui divisaient les Espagnols sous la Restauration. D’autres ont pensé qu’il s’agissait de l’illustration des querelles fréquentes entre paysans galiciens, pour des questions de terres et de bétail.

Cette oeuvre a inspiré d’autres artistes, comme le groupe newyorkais Elysian Fields, auteur de la chanson « Duel with Cudgels » (2005). L’auteur et metteur en scène espagnol Rodrigo Garcia en a fait l’un des deux sujets de sa pièce « Borges + Goya », présentée à Paris en 2006 au Théâtre de la Cité universitaire et précédée d’une vidéo inspirée du tableau (voir une image sur le site www.theatredelacite.com).
C’est aussi le titre d’une partition d’Hugues Dufourt pour flûte solo, éditée chez Lemoine en 2008 et commandée par Musique Nouvelle en Liberté et la Ville de Paris pour le concours Jean-Pierre Rampal (voir deux pages de la partition sur le site www.henry-lemoine.com / catalogue).
Et en 2009, lors d’une conférence à Bordeaux sur la crise contemporaine, le philosophe Michel Serres affirmait : « A l’instar du tableau de Goya “Duel à coups de gourdin », nous nous écharpons dans de vains combats tandis qu’à chaque coup de gourdin, l’un et l’autre, nous enfonçons dans les sables mouvants. Ces sables mouvants, c’est notre Monde… »

Jamais un combat au bâton ne semble avoir suscité autant de réflexions et de productions artistiques…

Article rédigé par Laurent Bastard. Merci :)

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