Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
Bibliothèque de ressources historiques, culturelles, artistiques, litteraires, sportives…sur la canne et le bâton, en France et dans le monde…
LE COMBAT DE PELHAM, PAR E. BULWER-LYTTON (1828)

Lord Edward BULWER-LYTTON, écrivain anglais (1803-1873) est connu pour son roman « Les Derniers jours de Pompéi » (1834). Mais six ans plus tôt, il avait publié un premier roman intitulé « Pelham, ou les aventures d’un gentleman », qui évoque les frasques dudit Pelham. Dès 1828, l’année de sa parution, il avait été traduit en français et publié par la Bibliothèque universelle des sciences, belles-lettres et arts, que l’on peut consulter en ligne sur Google books (p. 306-309).

On y découvre le récit de la joute au bâton que voici. Certains penseront que l’issue du combat est bien digne de la perfide Albion, mais ce seront de mauvaises langues…

« Dartmore et ses amis, nouveaux échappés d’Oxford, préféraient à tout autre le spectacle de Five-Court (combat de boxeurs) ; ils passaient le plus souvent leurs nuits à la taverne, et leurs matinées chez le commissaire de police. La table, placée au milieu de la chambre, était couverte de gants de boxeurs, de bâtons courts, de fleurets et de pots d’étain contenant du porter.
« Eh bien, camarades ! », cria Dartmore à deux jeunes gens placés au milieu de la chambre en manches de chemises, « lequel des deux bat l’autre ? »
« C’est ce que nous allons voir ! » répondit le plus grand, en lançant à son antagoniste un vigoureux coup de poing en forme de préliminaire.
Cette espèce de salut fut suivi d’un combat au pugilat, dont tous les assistants s’empressèrent de jouir en formant cercle autour des deux champions, et moi comme les autres.

Lorsque l’assaut, dans lequel le plus petit des combattants demeura victorieux, fut terminé, « Pelham ! » me dit Dartmore, « voulez-vous vous mesurer avec moi ? ». « Vous êtes vraiment trop bon ! » répondis-je avec ma nonchalance de bonne compagnie, et à l’ouïe de cette réponse, je vis qu’on souriait et qu’on se poussait du coude tout autour de moi.
« Préférez-vous tirer des armes avec Staunton ou faire un assaut de bâtons avec moi ? », me dit un fanfaron impudent et vulgaire nommé lord Calton.
« Je ne suis pas bien fort aux armes et je manie assez mal le bâton. Cependant j’échangerai volontiers quelques coups avec lord Calton. »
« Non, non », me dit Dartmore, « ne vous y frottez pas, Calton est le meilleur bâton de Londres, puis il frappe fort », ajouta-t-il en me parlant à l’oreille, « et il n’épargne personne ».
« Tant pis », répondis-je tout haut. « Tant pis, car je suis fort douillet ; mais puisque j’ai accepté, je ne me dédirai pas. Montrez-moi le bâton, je vous prie ; j’espère que la garde est bonne, car je ne voudrais pour rien au monde que mes mains fussent endommagées. Eh bien, commençons-nous ? J’ai diablement peur d’être battu, Dartmore ! » Et en parlant ainsi je riais sous cape à la vue des mines triomphantes de Calton et des siens, qui se flattaient de voir bientôt rosser un merveilleux.
« Allons-nous de bon jeu », dis-je en maniant mon bâton d’un air novice, tandis que Calton prenait la position d’un adepte dans la noble science du bâton. « Oui bien, parbleu ! », répondit-il. « Dans ce cas, dis-je en mettant mon chapeau, je vous conseille d’en faire autant ». « Je vous remercie », répondit Calton d’un air suffisant, « je saurai prendre soin de ma tête ».

Et nous commençâmes. Je me bornai d’abord à me défendre assez gauchement des attaques de Calton, puis tout à coup, changeant de position, je me ramassai de manière à diminuer ma taille de moitié, et prenant vivement l’offensive je fis reculer mon adversaire jusque dans un des coins de la chambre ; saisissant enfin un moment où Calton se découvrait par une attaque imprudente, j’esquivai le coup qui m’était destiné, et je le frappai moi-même si rudement sur la tête qu’il tomba tout étourdi.

A peine eus-je porté le coup que j’en fus fâché ; mais cependant, jamais une leçon de cette espèce n’avait été mieux méritée. Nous relevâmes le vaincu et le plaçâmes dans un fauteuil tandis que tous les assistants me félicitaient bruyamment de ma victoire. Ils étaient si enchantés de ma conduite que force fut de leur promettre de dîner avec eux à l’hôtel de *** . »

La portrait d’Edward Bulwer-Lytton illustrant cet article est issu de Wikipédia.

Article rédigé par Laurent Bastard. Merci.

Leave a Reply