Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
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La canne de l’architecte

Canne de maître d'oeuvre 3

Il existe de nombreuses images médiévales où l’on voit l’architecte d’un chantier de construction dirigeant les travaux, inspectant les bâtiments ou accueillant le roi qui les a commandés. Il tient presque toujours une baguette, canne ou bâton, d’assez grande dimension.

Cette « canne du maître d’oeuvre » a fait couler beaucoup d’encre. Faute d’en avoir retrouvé un exemplaire (sauf erreur de ma part), les commentateurs ont émis diverses hypothèses qui ne se contredisent pas.

D’abord, et c’est la plus vraisemblable, la canne est l’insigne de l’autorité. Elle assoit celle de l’architecte, qui était aussi l’appareilleur d’un chantier, c’est-à-dire celui qui déterminait les dimensions et la forme de chacune des pierres que vont tailler les ouvriers. C’était aussi lui qui embauchait et commandait les équipes de tailleurs de pierre.

Canne de maître d'oeuvre

Ensuite, cette canne avait sans doute pour fonction de pointer aux yeux de celui qui accompagnait l’architecte, tel ou tel détail du chantier en cours. C’était un « bâton qui désigne ».

Enfin, on a écrit que cette canne était un instrument de mesure, qui permettait de déterminer des modules.

Canne de maître d'oeuvre 4

Appelée « canne royale », elle mesurait environ 1,25 m et aurait comporté cinq unités de longueur d’où son nom de « quine », chaque unité étant liée à la précédente par le nombre d’or ayant pour valeur 1,618. Les divisions de la quine auraient été la paume, longueur de la main, correspondant à 34 lignes (7,64 cm), puis la palme, ou quatre doigts écartés, correspondant à 55 lignes (12,36 cm), puis l’empan, correspondant aux cinq doigts écartés et à 89 lignes (20 cm), puis le pied (ou pied de Charlemagne), de 144 lignes (32,36 cm) et enfin la coudée (coudée royale), de 273 lignes (52,36 cm). (selon Christian Guilbault et son site « Longueur, masse, temps et Cie »).

La pierre tombale de Hugues Libergier, architecte de l’église Saint-Nicaise de Reims, conservée en la cathédrale, nous le montre entre une équerre à ses pieds, à gauche, et un compas, à droite, tenant sa longue canne.

Des gravures du XVIIIe siècle (comme le frontispice de la « Théorie et pratique de la coupe des pierres », par Frézier (1738), nous montrent encore le maître d’oeuvre tenant sa canne.

Jusqu’au début du XXe siècle, cet attribut ou instrument de mesure semble encore attaché à la fonction. En effet, elle est bien visible dans la revue « Les Merveilles de l’exposition de 1900″ , qui légende la photo ici reproduite par ces mots : « Les travailleurs de l’Exposition : appareilleurs et compagnons tailleurs de pierre. Chantier des Champs-Elysées. »

Cet article a été rédigé par Laurent Bastard. Merci :)

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4 Comments to “La canne de l’architecte”

  1. Pour ce qui concerne les divisions de la « quine », je suis moi aussi très dubitatif… Quelle est la source ancienne de cette théorie qui envahit depuis environ vingt ans la littérature quelque peu ésotérique consacrée aux connaissances des « bâtisseurs de cathédrales » ? A ma connaissance, il n’en existe pas… La source moderne semble être dans les recherches du chanoine Betous d’Auch, relayées par certains numéros des Cahiers de l’Abbaye de Boscodon. Mais il s’agit d’une projection sur le passé de ses propres idées en ce qui concerne le Nombre d’Or, et non pas d’une tradition ancienne qu’il aurait mise à jour. Sur ce point, il est intéressant à signaler la vive critique formulée par Rémi Schulz : http://remi.schulz.perso.neuf.fr/tgh2.htm

  2. [...] Nous avons vu que les maîtres d’oeuvre médiévaux employaient une baguette pour effectuer des mesures lors des constructions (voir l’article La canne de l’architecte). [...]

  3. Bernard Jampsin dit :

    Votre article sur la canne de l’architecte me semble comporter une erreur. Le paume n’est pas la longueur de la main, mais sa largeur.
    Bien à vous
    B.J.

  4. Armelle Wolff dit :

    Merci pour cet article.
    Toutefois, ce qui concerne le nombre d’or serait à revoir. La notion est pour l’essentiel une invention du 19e siècle, en tous cas qui ne repose sur aucun document avéré pour le Moyen âge : https://www.afis.org/Le-mythe-du-nombre-d-or
    Au plaisir!

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