Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
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JUSTICE ARABE PAR LE BATON (1838)

La bastonnade semble avoir été l’une des sanctions les plus courantes autrefois, sous toutes les latitudes (voir l’article : Un châtiment universel : les atrocités de la bastonnade). Voici l’exemple de ce qui se pratiquait en Algérie dans les années 1830, selon A. de GONDRECOURT, dans ses « Souvenirs de nos campagnes d’Afrique », publiés dans la Revue de Paris en 1838, p. 24-25.

« Le chef est le juge suprême de ceux qui lui obéissent, il est le maître absolu et ne rend compte à personne de ses actions (…) Chaque matin, au lever du soleil, la tente du chef est ouverte à ses sujets ; les chefs inférieurs, les riches, les pauvres, tous ceux qui ont à se plaindre ou qui sont accusés, s’y rendent. Les deux schiaouss, le bâton à la main, sont placés l’un vis-à-vis de l’autre aux côtés du kébir (grand seigneur) (…).
C’est alors que la justice est rendue au peuple. Le chef seul prononce ; cependant il prend quelquefois conseil de ceux qui l’entourent ; l’exécution suit immédiatement la sentence (…). Un juge ne condamne jamais qu’à l’amende, aux coups de bâton, ou à la mort. C’est là toute la pénalité arabe. Le châtiment le plus dur est sans contredit l’amende. Les chefs s’enrichissent en l’appliquant, aussi n’en sont-ils point avares.
Quant aux coups de bâton, ils n’entraînent pas l’infâmie ; un Arabe qui en a reçu cinquante au lever du soleil, en a déjà perdu la mémoire à midi. La peau, les os, les fibres, peuvent souffrir dans le moment, mais le coeur est insensible, et ne comprend pas l’indignation. Des Français ont vainement cherché à leur inculquer des idées de révolte à ce sujet, les Arabes leur ont ri au nez en disant que l’âme n’a rien de commun avec le corps et qu’elle ne pouvait s’affliger de ces martyrisations de la chair.
Il est certain cependant que les coups de bâtons leur sont vigoureusement appliqués : le coupable est placé entre deux schiaouss qui frappent à tour de bras comme deux forgerons sur une enclume. Il montre une patience et un courage admirables, compte lui-même les coups et s’en retourne à sa tente si ses jambes le lui permettent. Mais si le châtiment est trop fort, si son corps ne peut résister, il se traîne dans un coin, s’enveloppe dans son burnous, et reste là jusqu’à ce que les forces lui reviennent, entouré de ses parents et amis, avec lesquels il s’entretient de toute autre chose. Puis le soir, si vous le rencontrez, il a l’air aussi fier que le premier baron de la chrétienté. »

La gravure est celle d’une « Vue d’un douar arabe » et illustre un article de Gondrecourt (« Courrier d’Afrique ») publié dans le Musée des familles de juillet 1847.

Article rédigé par Laurent Bastard. Merci :)

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