Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
Bibliothèque de ressources historiques, culturelles, artistiques, litteraires, sportives…sur la canne et le bâton, en France et dans le monde…
« BÂTONS ROMPUS » ET « VIEILLES CANNES »

C’est dans un livre de Louis BARRON (1847-1914), « Paris étrange, mœurs parisiennes » (1883), que se trouvent ces deux expressions. Mais avant d’aller plus loin, disons un mot de l’auteur et du livre.

Louis BARRON est né à Paris en 1847. Durant la Commune de Paris, en 1871, il s’engage activement aux côtés des insurgés et échappe dans un premier temps à la terrible répression qui suit l’écrasement de la Commune par les Versaillais en mai 1871.
Il reste en France et passe inaperçu mais il reconnu cinq ans plus tard ! Condamné en 1876, il est envoyé en déportation en janvier 1877 sur l’Ile des Pins, en Nouvelle-Calédonie.
Amnistié, il rentre en France en 1879. Il écrit comme journaliste, publie ensuite ses souvenirs de la Commune (« Sous le drapeau rouge », en 1889) et divers ouvrages d’observations sociales, dont « Paris étrange » en 1883.

Dans ce livre, le narrateur raconte sa rencontre avec un policier retraité, dit « Monsieur Lapince », qui lui fait découvrir les bas-fonds de Paris, les cabarets mal famés, les salles de bals populaires, le travail des chiffonniers, le monde des voyous…

Au chapitre VIII de « Paris étrange », il assiste à une bagarre entre un Anglais et un groupe de « garçons » (voleurs) qui lui ont dérobé montre et portefeuille. La rixe prend fin grâce à l’intervention d’un policier dit « le Furet » :

« Mais les assaillants, immédiatement enveloppés dans une boxe prestigieuse, secondée d’une étincelante volée de chausson, furent châtiés de leur témérité, et roulèrent à terre avant d’avoir pu même esquisser une parade.
- Bravo ! bien appliqué ! dit une voix impérative, et maintenant en voilà assez ! Tout le monde tranquille, ici ! ou gare à la « sourde » pour les « bâtons rompus » et les vieilles cannes » !
- C’est un collègue, me dit M. Lapince. Ma foi ! il arrive à propos. Je crois reconnaître « le Furet ». »

Le mot d’argot « la sourde » désigne la salle de police, la prison. Mais que signifient les « bâtons rompus » et les « vieilles cannes » ? Ce n’est qu’au chapitre suivant que le narrateur pose la question :
« – Il est fort, le Furet, me dit M. Lapince.
- Très fin ! Mais, à propos, quels gens appelez-vous « vieilles cannes » ?
- Les repris de justice.
- Et les « bâtons rompus » ?
- Les surveillés de la haute police, en rupture de ban. »

Voilà donc de nouvelles acceptions des mots « canne » et « bâton ».

L’illustration est extraite du livre. C’est la vue d’un cabaret, d’un « assommoir », où hommes et femmes oublient leur misère dans l’alcool.

Article rédigé par Laurent Bastard, merci :)

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