Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
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LE BATON par EMILE FAGUET (seconde partie)

Trés interressant article sur la définition du Bâtonnier, livrée par Emile Faguet, dans « Le Mois littéraire et pittoresque » (1904), disponible sur Gallica.Fr.

Nous vous livrons cet article en deux parties (la première partie a été publiée le 3 septembre 2012).

Voici la seconde partie.

Tout cela est faux, Dieu merci, autant qu’il est possible à quelque chose d’être faux, ce qui met la marge très large.

Les vrais savants connaissent très exactement la signification. du mot «bâtonnier ».

Le bâtonnier était celui qui portait le « bâton », c’est-à-dire la bannière de la confrérie. Cette bannière ou ce bâton était à l’effigie de saint Nicolas et de sainte Catherine.

C’était à ces deux saints que depuis 1341 l’Ordre des avocats de Paris était voué.

Pourquoi saint Nicolas? Probablement parce que saint Nicolas est le patron des jeunes gens, à cause de l’absolue pureté des moeurs qu’il a gardée.

Les avocats ont pour emblème l’hermine et pour saint l’hermine faite homme.

Pourquoi sainte Catherine? (Il s’agit de sainte Catherine d’Alexandrie, car sainte Catherine de Sienne n’est née qu’en 1341) Je l’ignore.

Elle fut martyre, mais les avocats n’ont pas avec le martyre — subi du moins — un rapport très manifeste. Si l’on consulte les juges, ils sont plutôt ceux qui l’infligent.

On se demande pourquoi les avocats n’ont pas plutôt choisi pour patron saint Yves, qui fut avocat de son métier et qui honora grandement la confrérie. Toujours, est-il — car nous nous écartons, comme il est naturel quand les avocats sont dans l’affaire — toujours est-il que le bâton des avocats était la bannière de la confrérie et que le bâtonnier était tout simplement le porte-bannière.

On déposait le « bâton » chez lui et il le gardait soigneusement et religieusement, comme le colonel garde le drapeau. On le portait devant lui dans les cérémonies et processions et c’était à l’ombre du bâton que M. le bâtonnier se promenait dans les rues quand les avocats faisaient cortège.

Et de là son nom.de Bâtonnier de l’Ordre.

Tout cela est bien loin, si loin qu’on ne sait plus même le sens des mots qui désignaient ces choses. Cela est si vrai que l’on a souvent confondu vaguement bâtonnier et massier.
Le massier était celui qui portait la masse dans les cérémonies universitaires. Mais le massier portant sa masse n’était qu’un bas officier de l’Université. C’était un sergent de bataille chargé d’écarter avec sa masse la foule encombrante ou indiscrète devant les pas de M. le recteur.

Encore une chose qui s’en va. On ne voyait plus les massiers qu’à la distribution des prix du concours général. Le concours général a disparu et avec lui sa distribution et avec elle les massiers. Plus de massiers, sinon sur quelque vague papier administratif. Quant au bâtonnier, j’ai montré que c’était tout autre chose, et lui, il survit.

Il survit à son bâton. Le bâton n’existe plus et le bâtonnier règne encore. « Bâtonnier de l’Ordre», cela fait bien même pour ceux qui ne savent pas ce que cela signifie. « Bâtonnier de l’Ordre » répond à une idée confuse de haute autorité et de rigidité magistrale.

Quoi qu’on dise, on le sait assez, l’Ordre aura toujours besoin d’un bâton, et plus de bâtonnier, plus d’Ordre. En ce sens, l’Ordre des avocats est symbolique de l’ordre universel.

FM

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