Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
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UNE CANNE POSEE SUR UN CERCUEIL

Au sein de certains groupes sociaux, la canne est un attribut identitaire et une marque de la fonction de ceux qui la possèdent. Aussi, lors de leur cérémonie d’inhumation, était-elle posée sur leur cercueil, avec d’autres équipements.

Il en était ainsi chez les officiers de certains corps d’armée au XVIIIe siècle. La « Seconde partie du réglement et ordonnances pour tous les régimens » (1753), dispose en effet (p. 68), au chapitre des enterrements, que, chez les cuirassiers, « Sur le cercueil du défunt, on attachera la croix, son épée nue et sa canne, le fourreau au milieu en longueur ; l’épée et la canne seront garnies d’une crêpe noire ».
Et plus loin (p. 73) : « A tous ceux qu’il est permis de porter des cannes ou bâtons, pourront poser l’épée et canne en croix sur le cercueil ». Après l’inhumation, la canne du défunt est attribuée hiérarchiquement : « D’un colonel propriétaire (de son régiment), la canne et l’épée appartiendra à son adjudant, et d’un colonel commandant, lieutenant-colonel et major, à l’adjudant du régiment. D’un capitaine et d’un lieutenant, la canne appartiendra à l’adjudant du régiment, telle qu’elle est, et ne pourra point prétendre de l’argent pour la valeur. D’un enseigne, comme ils ne portent point de canne, il ne pourrait rien prétendre. »

En août 1786, aux obsèques du roi Frédéric II de Prusse, à Berlin, un observateur notait que « Au pied du cercueil on voyait un tabouret sur lequel, outre l’écharpe, étaient placés en sautoir l’épée et une canne ayant un pommeau bleu, émaillé en or. » (Journal politique, ou Gazette des gazettes, 1786, p. 18).

Au XIXe siècle, sans que cela soit codifié, l’usage de déposer sur le cercueil l’épée et la canne d’un tambour-major est mentionné par Jules JANIN dans « Les Oiseaux bleus » (1864), au chapitre « Le Treizième arrondissement », p. 238.

On retrouve cet usage de déposer une ou deux cannes sur la bière d’un défunt, chez les compagnons au XIXe siècle. Agricol PERDIGUIER, dans le « Livre du Compagnonnage » (1841) écrit (p. 65), que « le cercueil est paré de cannes en croix, d’une équerre et d’un compas entrelacés, et des couleurs de la Société. »

Cet usage était ou non observé selon les associations compagnonniques. Il l’est encore selon les corps de métiers. Certains compagnons sans descendance ou attachés à leur canne, demandent parfois à ce qu’elle soit placée à côté d’eux dans leur cercueil, avec leurs couleurs (rubans) et portées en terre avec leur corps.

La gravure illustrant cet article est extrait de l’article sur « Les Compagnons du Tour de France », dans la revue L’Illustration du 29 novembre 1845.

Article rédigé par Laurent Bastard. Merci :)

2 Comments to “UNE CANNE POSEE SUR UN CERCUEIL”

  1. Laurent BASTARD dit :

    Voici un exemple de compagnon inhumé avec sa canne. Il s’agit du compagnon Alphonse Ducloux, dit l’Ami de Vénus, charpentier à Orléans, décédé en mars 1901. Le compte rendu de ses obsèques comporte ces lignes :

    « Ce Compagnon, avant de rendre le dernier soupir, a réclamé à sa famille sa canne et ses couleurs pour que les Compagnons puissent les mettre avec lui. Les Compagnons ont obéi aux dernières volontés du défunt et les ont déposées sur le cercueil. La première terre qui a coulé a recouvert, devant nous tous, les insignes sacrés, et la famille a remercié les Compagnons de la ville d’Orléans de l’empressement qu’ils avaient mis à accomplir les dernières volonté de leur regretté parent. »

    Source : L’Officiel du Ralliement des Compagnons du Devoir, n° 9, 1er avril 1901, p. 2.

  2. Laurent BASTARD dit :

    Un deuxième exemple de compagnon inhumé avec sa canne, découvert dans le journal « Le Ralliement » n°484 du 3e trimestre 1938, p. 7 :

    « COLOMBES (Seine). Les obsèques du Compagnon charpentier du Devoir Brun Albert ont eu lieu à Colombes le 5 août 1938. Le défunt avait tenu à ce que sa canne et ses couleurs fussent déposées dans son cercueil. »

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