Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
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Rabelais et le bâton de frère Jean des Entommeures

Frère Jean des Entommeures

François Rabelais (1494-1553) est l’auteur de cinq livres extraordinaires et réconfortants dont le fameux « Gargantua » (1534) renferme un combat débridé au bâton.

Un roitelet nommé Pichrocole, mégalomane et belliqueux, a déclaré la guerre au bon Grandgousier et à son fils Gargantua. Ses soldats sont aux abords de l’abbaye de Seuilly, occupés à manger du raisin. Les moines ne savent que faire lorsque l’un d’eux, le frère Jean des Entommeures, décide de passer à l’attaque.

Voici un extrait de son combat au bâton, dont j’ai légèrement modernisé l’orthographe pour en faciliter la lecture. L’image est de Gustave Doré, merveilleux graveur qui illustra l’édition des oeuvres de Rabelais au XIXe siècle.

« Ce disant, il mit bas son grand habit et se saisit du bâton de la croix qui était de coeur de cormier, long comme une lance, rond à plein poing et quelque peu semé de fleurs de lys, toutes presque effacées. Ainsi sortit en beau sayon, mit son froc en écharpe et de son bâton de la croix donna brusquement sus les ennemis qui, sans ordre ni enseigne, ni trompette ni tambourin, parmi le clos vendangeaient. (…) Il choqua donc si roidement sur eux, sans dire gare, qu’il les renversait comme porcs, frappant à tort et à travers, à la vieille escrime. Aux uns écrabouillait la cervelle, aux autres rompait bras et jambes, aux autres délochait les spondiles du col, aux autres démoullait les reins, avalait le nez, pochait les yeux, fendait les mendibules, enfonçait les dents en la gueule, écroulait les omoplates, sphacelait les grèves, dégondait les ischies, débezillait les faucilles. (…) Si aucun sauver se voulait en fuyant, à icelui faisait voler la tête en pièce par la commissure lambdoïde. Si quelqu’un grimpait à un arbre, pensant y être en sûreté, lui, de son bâton, l’empalait par le fondement. (…) Les uns mouraient sans parler, les autres parlaient sans mourir, les uns mouraient en parlant, les autres parlaient en mourant. (…) Ainsi, par sa prouesse, furent déconfits tous ceux de l’armée qui étaient entrés dedans le clos, jusqu’au nombre de treize mille six cent vingt deux, sans les femmes et petits enfants, cela s’entend toujours. Jamais Maugis l’hermite ne se porta si vaillamment avec son bourdon contre les Sarrasins, desquels il est écrit dans la geste des quatre fils Aymon, comme fit le moine à l’encontre des ennemis avec le bâton de la croix. »

Article écrit et « adapté », par Laurent Bastard. Merci :)

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