Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
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QUI ETAIT FANFAN LE BATONNISTE ? (2)

La renommée du bâtonniste Fanfan devint telle que son nom fut donné à une pièce de théâtre en 1845 : « Fanfan le bâtonniste. Comédie-vaudeville en deux actes, par MM. J. GABRIEL et DUPEUTY, représentée pour la première fois à Paris, sur le théâtre du Vaudeville, le 30 août 1845. »
Nous donnons de larges extraits et un résumé de cette pièce où Fanfan apparaît sous les traits d’une brave garçon, un peu simple mais avec un grand coeur. Il est dénommé « Pierre Rogier », mais était-ce le vrai nom de Fanfan ? Ne se serait-il pas plutôt prénommé François ? Est-ce un patronyme imaginaire ? Fanfan le bâtonniste recouvrait-il plusieurs identités ?

On remarquera aussi que Fanfan est présenté comme un bâtonniste de rue, un équilibriste du bâton et non pas comme un joueur de bâton, au sens de maître d’armes. Nous avons déjà signalé l’ambiguïté du terme « bâtonniste », qui désignait jusqu’au milieu du XIXe siècle les deux activités, qui pouvaient d’ailleurs être exercées par un seul et même homme. Mais place au théâtre !

Personnages :
Pierre Rogier, dit Fanfan le bâtonniste.
De Bougival, capitaliste.
Victor Brévanne.
M. Précieux, marchand retiré du commerce.
Un notaire.
Etienne, garçon de restaurant.
Marie.
Melle Précieux.
Un Momusien.
Un marié.
Garçons restaurateurs. Invités à la noce. Valets.

Acteurs :
M. Félix Amant
Desbirons
Ludovic
Camiade
Ballard
Melle Figeac
Durand

Fanfan apparaît à la scène IV de l’acte IV. On entend le tambour sur la place du Châtelet.
« De Bougival. : Qu’est-ce que c’est que ça, mon bon monsieur Précieux ?
M. Précieux : C’est un spectacle en plein vent ; moi, qui suis un flâneur du quartier… je connais ça ; nous avons toute la journée la comédie sur la place du Châtelet… des chanteurs, des équilibristes, des escamoteurs. Celui-ci, c’est un gaillard qui joue joliment du bâton ; on l’appelle Fanfan le Bâtonniste… Il est d’une adresse surprenante. (Ici le tambour cesse ; tous les personnages qui sont sur le balcon regardent en bas. On aperçoit souvent le bâton de Fanfan qui s’élève et tourne en l’air au milieu de la place) »

Fanfan va ensuite manger dans un restaurant. Il remarque Marie, une jeune femme, qu’il trouve jolie. Puis Victor Brévanne entre, un peu aviné, et ennuie Marie. Fanfan intervient pour écarter le gêneur qui le traite d’insolent.
« Fanfan : Insolent ! (il fait le moulinet avec son bâton). Gare là-dessous ! Il va vous tomber quelque chose sur les épaules. »
Victor le provoque en duel mais deux habitués du restaurant entrent et nomment Fanfan. A ce nom, Victor prend peur : « Ah ! un instant, je dépose les armes, la partie n’est pas égale.
 » Fanfan : « J’en ai peur ! »
Victor se confond alors en excuses et flatte Fanfan :
« Oui, vous n’êtes qu’un ingrat… Car lorsque vous méditez ma destruction… moi je rêve votre gloire ! »
Fanfan : « Qu’est-ce que ça veut dire ?
Victor : « Ca veut dire que, tout à l’heure, quand vous faisiez tournoyer votre bâton dans les airs… nous improvisions des couplets à votre honneur, et que nous faisions passer à la postérité le beau nom de Fanfan le Bâtonniste. »
Puis Marie prend Fanfan à part, le remercie et lui confie qu’elle est promise à mariage, mais qu’elle est jalouse. Fanfan lui répond : « Je vous comprends, mamselle : la jalousie est à l’amour ce que le rotin est au bâtonniste… deux êtres inséparables. » Il lui promet de l’aider.

A la scène XII, Fanfan, qui a été régalé par les deux messieurs qui sont entrés dans le restaurant, entre en scène en chantant :
« Tonton, tontaine, tonton ! (Parlant :) En voilà de la joie et de la gaieté qui ne sont pas de contrebande. Ah ! les bons vivants ! … C’est que c’est vrai ! … Ils m’ont mis en chanson… Ils m’ont habillé en huit couplets… J’en ai retenu deux !

Air connu.
Premier couplet.
De Fanfan chantons la puissance,
Il porte un sceptre en bois breton !
Tonton, tonton, tontaine, tonton,
En France,
Sans la concurrence,
Il serait le roi du bâton,
Tonton, tontaine, tonton.

Deuxième couplet.
Financiers, gros capitalistes,
Sont ses rivaux, le croierait-on ?
Tonton, tonton, tontaine, tonton,
Paris ne voit que bâtonnistes
Qui vivent du tour du bâton !
Tonton, tontaine, tonton. »

Marie et Fanfan prêtent alors l’oreille et entendent le bruit d’une noce. Le promis de Marie est là et on apprend qu’il est déjà marié. Marie s’enfuit, éplorée. Fanfan s’apprête à à sortir du restaurant quand apparaît Bougival. A ce nom, Fanfan lui dit qu’il a connu son frère, capitaine de navire. Il était son premier matelot mais le capitaine est mort en laissant 400 000 francs en héritage. Il lui a confié qu’il avait une fille naturelle et lui a demandé de la rechercher. Fanfan débarqua à Marseille et entreprit de retrouver la fille du capitaine : « Eh bien ! moi, il me revient à l’idée que j’étais Breton, que je savais jouer du bâton à deux bouts… Pour lors, je me dis : En avant la canne, et faisons mon tour de France, en levant un impôt sur les badauds de toutes les localités… Ce qui fut dit fut fait… Représentations en plein vent, recettes en gros sous, tout ça a marché de clocher en clocher, comme l’aigle du grand Napoléon, depuis Marseille jusqu’à Paris… Et chaque fois que je terminais mes exercices, pensant à mon pauvre capitaine… je jetais à la foule ces mots provocateurs… « Messieurs et dames, y aurait-il quelqu’un, dans l’aimable société, qui connaîtrait une demoiselle nommée Thérèse Lariche ? » (…) Personne n’a encore répondu à l’appel, mais je ne me décourage pas… Et voilà comment Pierre Roger, le matelot de première classe, s’appelle maintenant Fanfan le Bâtonniste ! »

A ce moment, on entend des cris : Marie s’est jetée dans la Seine, désespérée par la tromperie de son faux fiancé. Fanfan la sauve et finit par confier – imprudemment – que l’héritage est auprès du consul de France à Baltimore.
Entre temps, on fouille Marie évanouie et Bougival découvre dans son portefeuille qu’elle ne s’appelle pas Marie mais qu’elle est la fille naturelle du capitaine Godefroy. Thérèse Laroche, que recherchait Fanfan, c’est elle ! Aussitôt Bougival se propose de l’héberger pour détourner l’héritage de son frère à son profit.

Fanfan, qui n’a rien vu, quitte l’assemblée en demandant au garçon son « indispensable compagnon de voyage » et le garçon lui remet son bâton. Il fait un dernier moulinet et demande si quelqu’un connaît Thérèse Laroche. Personne ne lui répond, surtout pas Bougival…

La fin au prochain article…

Article rédigé par Laurent Bastard. Merci :)

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