Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton
Bibliothèque de ressources historiques, culturelles, artistiques, litteraires, sportives…sur la canne et le bâton, en France et dans le monde…
« MA CANNE », PAR BERANGER (VERS 1850)

Jamais autant qu’au XIXe siècle les poètes n’ont célébré la canne et le bâton, et nous avons déjà donné plusieurs oeuvres sur ce sujet : de l’abbé Reyre (Le vieillard et son bâton), de Bressier (Le bâton du vieillard), d’André Theuriet (La canne du grand-père), de Victor Denis (La fable des deux cannes), de Raymond Mahauden (Adieux à ma canne), sans parler des chansons des compagnons du tour de France.

En voici une autre, de l’illustre BERANGER (1780 – 1857), le chansonnier patriotique qui usait de la satire sous la Restauration et dont les airs étaient fredonnés par le peuple. Parmi ses dernières oeuvres, écrites entre 1848 et 1851) figure une chanson, sans air connu, intitulée « Ma Canne ». Elle reprend le thème de la vieille canne, issue d’un cep de vigne, qui accompagne et soutient le poète au soir de sa vie.

« MA CANNE
Le soleil aux champs d’aller nous fait signe,
Chaque jour s’enfuit de fleurs couronné.
Viens, mon compagnon, humble cep de vigne,
Ami qu’en riant le sort m’a donné.
De quel cru fameux versas-tu l’ivresse ?
L’ai-je célébré dans un gai repas ?
Si jadis ta sève égara mes pas,
Toi seul aujourd’hui soutiens ma vieillesse.

A travers bois, prés et moissons,
Allons glaner fleurs et chansons. (bis)

Viens, loin des fâcheux, méditer ensemble ;
Je me fie à toi de tous mes secrets.
Tu m’entends chanter d’une voix qui tremble
De grands souvenirs, de tendres regrets.
Au froid, à la neige, au flot des ondées,
Au bruit du tonnerre, au fracas du vent,
Combien, triste ou gai, quand je vais rêvant,
Sous mon vieux chapeau bourdonnent d’idées !

A travers bois, prés et moissons,
Allons glaner fleurs et chansons. (bis)

Dirige le char de la République,
M’ont crié des fous, sages d’à présent.
Qui, moi ! m’atteler au joug politique,
Lorsqu’il faut un aide à mon pas pesant !
Ai-je à tel labeur force qui réponde ?
Qu’en dis-tu, bâton, las de me porter ?
Tu gémirais trop de voir ajouter
Au poids de mon corps tout le poids d’un monde.

A travers bois, prés et moissons,
Allons glaner fleurs et chansons.(bis)

A mes premiers temps j’ai vieilli fidèle.
Tout un passé meurt, mourons avec lui.
Mon cep, je te lègue à l’ère nouvelle ;
Sois pour des vaincus un dernier appui.
Oui, sachant, ami, dès que le jour tombe,
Combien de faux pas je ferais sans toi,
Pour quelque proscrit, tribun, pape ou roi,
Je veux te laisser au bord de ma tombe.

A travers bois, prés et moissons,
Allons glaner fleurs et chansons. (bis)

Le portrait illustrant cet article est extrait d’une biographie de Béranger parue dans « L’Ami de la maison », du 3 avril 1856.

Article rédigé par Laurent Bastard. Merci :)

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